L’art ABRUPT des discontinuités

Amis poètes bonjour !

De Lascaux à Bornéo, l’Homme affiche son goût des représentations, affranchies des consignes et des conventions, offertes à d’infinis commentaires sans espoir d’une quelconque vérité. C’est dans les pas de cette Humanité libre de sa pensée que l’Art ABRUPT se situe.

L’univers est discontinu, un puzzle dont les pièces ne s’emboitent pas exactement et dont nous ne voyons pas la figure finale, une sorte de monde en pointillé dans lequel chaque tiret a sa logique propre mais qu’on peine à se définir dans son ensemble. L’Art ABRUPT est une poétique des discontinuités du monde, une forme d’archéologie de la pensée. L’art impressionniste a voulu capter les subtilités de la lumière comme l’art surréaliste s’est attaché à mettre en évidence les absurdités de l’existence et ainsi de suite chaque auteur ou chaque époque se penche plus précisément sur des interrogations particulières

L’Art ABRUPT n’est pas un courant artistique par son style, ses conventions techniques ou ses primats idéologiques. L’Art ABRUT se distingue, par trois aspects principaux :

  • C’est une expression personnelle à propos des discontinuités du monde, par la pensée graphique, sur un mode poétique et philosophique.
  • L’œuvre est le résultat d’un équilibre esthétique subjectivement choisi par l’auteur pour transmettre ses réflexions, sans prérequis techniques ou idéologiques.
  • Les spectateurs sont les artistes-interprètes de l’œuvre conçue comme une partition, une invitation à poursuivre une conversation en résonnance avec ses propres questions.

L’Art ABRUPT vise précisément l’exploration des incertitudes, par des évocations poétiques, pour partager des idées et des réflexions face aux aléas de l’existence. Le caractère intimiste de ce processus conduit naturellement à préférer les formats limités en taille, compatibles avec une présence de tous les jours dans un environnement personnel.

On ne vit pas ni ne converse si facilement avec des géants qui affichent pompeusement leurs certitudes. Le XXIème siècle a privilégié, me semble -t-il, les œuvres monumentales avec des codes simplifiés, répétitifs, transgressifs par principe et souvent orientés vers des messages sociétaux plus ou moins engagés. Le climat, la Nature, la critique de l’Histoire et des civilisations, les discriminations, etc. ont toujours le vent en poupe avec en prime le support massif des structures institutionnelles, un art dominant et normatif, quasi politique en quelques sorte.

J’ai eu l’impression de traverser cette époque en solitaire en œuvrant à contre-courant, m’interrogant sur la nature humaine, la puissance des réseaux et l’impuissance du langage ou la démesure des technologies et la persistance de la barbarie, mais je n’ai pas quitté mes champs de recherche pour autant.

L’ART ABRUPT n’est pas un art de rébellion ni de combat c’est un art de réflexion. C’est une démarche qui s’inscrit parfaitement dans la suite des questionnements sur l’insuffisance des mots pour se comprendre et communiquer. À ce titre l’art ABRUPT peut tout à fait être considéré un art de l’approximation par la pensée graphique, pour dépasser les limites du langage syntaxique. Une ne posture assez différente en somme des approches plus instinctives de l’Art Brut.

En contrepoint des propositions de déconstruction cubistes de la réalité et à fortiori de l’Art Contemporain qui érige la transgression en méthode, l’Art ABRUPT est d’abord une construction, autoréférentielle et en dehors des codes et normes culturelles du moment. Il vise et la transmission directe d’une vision poétique du monde, sans filtres nécessaires, à tous les artistes-interprètes, dans la continuité historique de l’expérience humaine via la pensée graphique.

En effet, chaque réalisation se traduit, par le truchement de la pensée graphique en une expression dont la consistance finale ne tient qu’à la volonté de l’auteur. Il appartient ensuite à chacun de transcender et poursuivre par ses propres interprétations, à partir de cette restitution des discontinuités du monde. La perspective d’une réappropriation directe des œuvres d’art par les artistes-interprètes que nous sommes tous naturellement, s’inscrit en porte-à-faux, dans un contexte où le monde de l’art semble vouloir définir à lui seul, les conditions de ce rapport entre l’art et la société.

L’Art est, en effet, un processus dynamique de création, de culture et de sens entre des artistes, auteurs ou spectateurs. Contempler personnellement une œuvre, mieux encore en dehors des critiques et commentaires préformatés, procède de cet extraordinaire mécanisme collectif de méditation et de création qui cristallise implicitement les marqueurs poétiques d’une communauté.

Amis poètes bon vent.